Quel avenir pour les Tarifs Réglementés de Vente de l’Electricité (TRVE) ?

Pour un maintien des TRVE pour cinq années supplémentaires

La CRE, dans son rapport d’évaluation du novembre 2024, estime que les TRVE jouent un rôle encore essentiel dans le paysage énergétique français, tant pour les consommateurs que pour la stabilité du marché de détail.

Elle souligne d’abord leur large diffusion. Près de 59 % des sites résidentiels y sont encore abonnés et l’impact sur la structuration des offres du marché est manifeste. Notamment à travers les offres à prix lissé sur deux ans, qui ont aidé à amortir le choc énergétique récent et dont les bénéfices restent d’actualité.

Au-delà de cette fonction de bouclier tarifaire, les TRVE portent une logique de flexibilité utile à la sécurité d’approvisionnement. Ce rôle, la CRE l’estime encore peu substituable, justifiant ainsi de prolonger l’existence des TRVE pour les cinq prochaines années, avant une nouvelle évaluation.

Ou vers une suppression anticipée

L’Autorité de la concurrence (ADLC) adopte un ton radicalement opposé. Dans son rapport du 19 novembre 2024, elle invitait le gouvernement à engager une suppression progressive des TRVE, considérant que ces tarifs constituent une intervention tarifaire qui ne répond plus aux exigences du marché ni aux objectifs de la directive européenne 2019/944 sur la libre fixation des prix.

Elle rappelle que les TRVE captent une part majeure de la clientèle résidentielle et non résidentielle, en la privant de choix concurrentiels, d’innovation et souvent d’offres plus avantageuses. Elle met en garde contre les effets absurdes d’un dispositif dont la fixation devient politique au détriment d’une régulation économique pure.

Pour pallier cette disparition, elle propose des dispositifs mieux ciblés :

• Désigner un ou plusieurs fournisseurs de dernier recours, et renforcer les aides pour les ménages vulnérables (chèques énergie, exemptions) ;
• Développer l’usage du comparateur du Médiateur de l’énergie ;
• Encourager les offres avec indemnités de résiliation pour sécuriser les consommateurs ;
• Et ouvrir à tous les fournisseurs la possibilité de proposer des TRVE afin de limiter la position dominante d’EDF.

Le gouvernement tranche : les TRVE seront maintenus jusqu’en 2026

En février 2025, le gouvernement a publié un rapport à destination de la Commission européenne indiquant son choix en faveur du maintien des TRVE, s’alignant ainsi sur la position de la CRE. Le gouvernement met en avant leur rôle stabilisateur et leur contribution à la sécurité d’approvisionnement, notamment face aux effets violents des crises récentes.

Cette décision laisse ainsi ouverte la suppression des TRVE, mais à plus long terme, en évitant une rupture brutale dans un contexte déjà instable.

Un avenir à géométrie variable

Ce compromis proposé par le gouvernement repose donc sur les arguments présentés par la CRE. Les TRVE offrent pour l’instant une protection non remplaçable face à la volatilité du marché et leur suppression précipitée risquerait de déstabiliser les consommateurs et les fournisseurs alternatifs.

Mais l’ADLC maintient pourtant une vision long terme, mettant en avant la nécessité d’un marché plus concurrentiel, moins dépendant des interventions publiques. À terme, la transition énergétique appelle justement à des signaux-prix plus efficients, capables d’encourager la sobriété énergétique.

Un statu quo temporaire

Pour l’instant, les TRVE restent un pilier du marché résidentiel français, offrant une protection dans un contexte économique instable et de fin programmée de l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH) le 31 décembre 2025 prochain. La CRE plaide pour leur maintien au moins jusqu’en 2029. Mais dans l’ombre se préparera peut-être un retrait progressif, encadré par des mécanismes ciblés visant à garantir une transition juste et concurrentielle, comme souhaité par la Commission Européenne, qui se prononcera d’ici la fin d’année avec l’éventualité d’une proposition législative qui peut comprendre une date de fin pour les prix réglementés.